Dans un monde professionnel en constante évolution, la flexibilité est souvent synonyme d’épanouissement et de succès. Cependant, jusqu’où un employeur peut-il aller pour réorganiser son équipe ? Une affaire récente, jugée par la Cour de cassation, met en lumière la délicate balance entre les droits des salariés et les prérogatives de l’employeur.
La réaffectation : un droit ou une transgression ?
Lorsque l’on évoque la mobilité interne, on pense souvent à une progression, à une opportunité d’évolution. Mais qu’en est-il lorsque cette mobilité s’apparente à un retour en arrière ? C’est la question qui a été posée à la Cour, suite à la mésaventure d’une auxiliaire ambulancière.
Embauchée en 2012, cette salariée avait vu ses fonctions évoluer vers des tâches administratives en 2016. Toutefois, deux ans plus tard, l’employeur décide de la réaffecter à son poste initial. Face à ce qu’elle considère comme une régression, la salariée refuse de reprendre le travail, ce qui conduit à son licenciement pour faute grave.
Un licenciement que la salariée a fermement contesté au point de faire appel à la justice. Elle a tenu notamment à rappeler que la convention collective des transports routiers stipule : « Lorsqu’un ouvrier est affecté définitivement à un emploi différent de son emploi habituel, le changement d’emploi doit faire l’objet d’une notification écrite.
Si le nouvel emploi comporte un salaire garanti inférieur à celui de l’ancien emploi, l’ouvrier a le droit, sauf si l’employeur lui maintient les avantages de son ancien emploi, de ne pas accepter ce déclassement. Si l’ouvrier refuse, le contrat est considéré comme rompu du fait de l’employeur ; s’il accepte, il est rémunéré dans les conditions correspondant à son nouvel emploi ».
De l’avis de Convention.fr, la question centrale de cette affaire était de déterminer si ce retour à la case départ constituait une simple modification des conditions de travail ou une modification du contrat de travail. La nuance est de taille : dans le premier cas, l’employeur est en droit d’imposer le changement. En revanche, dans le second cas de figure, le consentement du salarié est indispensable.
La convention collective : une boussole juridique
La salariée, armée de la convention collective des transports routiers, a plaidé que son affectation aux tâches administratives n’était pas temporaire, mais bien un changement d’emploi définitif. Selon elle, toute réaffectation à son poste initial nécessitait son accord explicite.
La convention stipule en effet que lorsqu’un salarié est affecté de manière permanente à un poste différent de son emploi habituel, ce changement doit être notifié par écrit. Plus encore, si le nouveau poste offre une rémunération inférieure, le salarié a le droit de refuser ce déclassement.
La cour de cassation tranche
Les premiers juges avaient tranché en faveur de l’employeur, considérant que le retour au poste d’auxiliaire ambulancière relevait d’une modification des conditions de travail. Mais la Cour de cassation, dans sa sagacité, a vu les choses autrement. Elle a souligné que l’employeur n’avait pas respecté les dispositions de la convention, notamment en matière de notification écrite. De plus, elle a estimé que l’affectation de 2016 n’était pas temporaire. Par conséquent, le retour à ses fonctions antérieures constituait une modification du contrat de travail, nécessitant l’accord de la salariée.