À l’heure où les entreprises françaises cherchent à accélérer leur développement, une stratégie se démarque de plus en plus nettement : la croissance externe par le biais du M&A (Mergers & Acquisitions). Les dirigeants ont compris que pour conquérir rapidement de nouveaux marchés, s’implanter à l’étranger et renforcer leur compétitivité, les opérations de fusion-acquisition représentent un levier aussi puissant que structurant. En 2025, cette approche s’impose comme un véritable accélérateur stratégique. Décryptage avec Nicolas Bianciotto !
L’optimisme des dirigeants et le pari de l’international
Selon la 28e Global CEO Survey publiée par PwC, 58 % des dirigeants français envisagent d’investir hors de leurs frontières dans les douze prochains mois. Un chiffre révélateur, surtout dans un contexte mondial instable, marqué par des tensions géopolitiques persistantes. Pourtant, seuls 15 % d’entre eux considèrent ces tensions comme un risque majeur. Cette confiance, que certains pourraient qualifier d’« offensive », se traduit par une volonté affirmée de viser les États-Unis, qui concentrent à eux seuls 42 % des intentions d’investissement à l’étranger.
L’explication ? L’économie américaine, malgré son instabilité politique, reste synonyme de marché vaste, dynamique et technologiquement avancé. Dans ce paysage, les acquisitions ciblées permettent de prendre pied rapidement dans des écosystèmes complexes sans repartir de zéro.
Pourquoi miser sur le M&A en 2025 ?
Les chiffres sont éloquents : 26 % des entreprises françaises ont réalisé au moins une acquisition majeure au cours des trois dernières années, et elles seront 55 % à en envisager une nouvelle d’ici 2028. Mais au-delà de la tendance, c’est l’urgence stratégique qui domine. Pour Stéphane Salustro, associé responsable des activités Deals chez PwC France et Maghreb, « le temps est l’ennemi de la valeur ». Dans une économie mondialisée où les cycles d’innovation se raccourcissent, il faut aller vite — sans pour autant négliger la pertinence des choix.
Les fusions-acquisitions répondent à plusieurs besoins en un seul mouvement : elles offrent un accès immédiat à des marchés, permettent de s’approprier des technologies ou des savoir-faire, renforcent la crédibilité de l’entreprise localement, et favorisent une diversification sectorielle.
Conquérir de nouveaux métiers, de nouveaux marchés
L’une des tendances marquantes de ces dernières années est la capacité des entreprises à devenir compétitives dans des secteurs où elles n’étaient pas présentes auparavant. Selon l’enquête, 38 % d’entre elles ont su opérer ce virage. Là encore, le M&A joue un rôle clé. Par exemple, lorsqu’une entreprise industrielle acquiert une pépite technologique ou qu’un acteur historique se renforce dans un métier connexe grâce à une acquisition ciblée, ce n’est pas seulement une croissance chiffrée, c’est une transformation stratégique.
Un exemple concret : le rachat de la SGEF par le Groupe BPCE. En absorbant cette société de financement d’équipements, BPCE Lease s’impose comme un leader du leasing d’équipements en Europe (hors automobile). Pour Salustro, cette opération illustre parfaitement « la force et la vertu du M&A pour atteindre rapidement plusieurs objectifs », à commencer par l’impact positif sur l’économie réelle.
Anticiper les mutations pour rester viable
Autre signal fort de cette nouvelle ère : 68 % des dirigeants interrogés estiment que leur modèle d’entreprise ne sera plus viable d’ici dix ans s’il n’évolue pas en profondeur. Un bond significatif par rapport à 2023 (45 %). Face à l’impératif de transformation, le M&A devient alors une réponse directe, conjuguant vitesse et efficacité. Il ne s’agit plus seulement d’acheter pour croître, mais d’acquérir pour se réinventer.
Qu’il s’agisse de s’adapter aux nouvelles réglementations, d’intégrer des solutions basées sur l’intelligence artificielle ou de répondre aux attentes environnementales, le recours à des acquisitions ciblées permet de gagner un temps précieux et d’éviter des développements internes trop lents ou incertains.
Une discipline qui demande agilité et anticipation
Si le M&A est un accélérateur, il n’est pas une solution miracle. Réussir une opération implique une lecture fine des enjeux géopolitiques, une capacité à structurer le deal dans un cadre réglementaire de plus en plus exigeant, et surtout, une vision claire de la valeur à long terme.
En 2025, la taille moyenne des opérations a d’ailleurs augmenté de 11 %, portée notamment par une hausse des transactions supérieures à un milliard de dollars. Un signe que les ambitions grandissent, mais que les marges d’erreur se réduisent. Les entreprises qui tirent leur épingle du jeu sont celles qui savent marier rapidité d’exécution et rigueur d’analyse.