Ce mardi, le président de la Conférence des évêques de France s’entretient avec le ministre de l’Intérieur. Cette rencontre est organisée à la suite des propos du président sur le secret de la confession relatif aux abus sexuels dans l’Eglise. D’où la question : le secret de la confession est-il plus fort que les lois de la République ? La réponse avec Antoine Béraud, avocat.
Droit canon Vs Droit de la République
La question se pose quant à la compatibilité du droit canon avec le droit de la République française. Le débat fait surface suite aux propos du président de la Conférence des évêques de France, tenus après la sortie du rapport Sauvé qui révélait que plus de 200 000 personnes ont été victimes d’abus sexuels en France. Les dits abus ont été commis par des membres du clergé depuis 1950… Dans ses propos, Monseigneur de Moulins-Beaufort, qui a rendez-vous ce mardi avec le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, avait affirmé que le secret de la confession (relatif à une agression sexuelle) « s’imposait » aux prêtres et était « plus fort que les lois de la République ».
Sans surprise, cette déclaration de l’ecclésiastique a été à l’origine d’une vive polémique. Le président de la Conférence des évêques de France y a répondu en déclarant que son entretien avec le ministre de l’Intérieur serait « l’occasion de rappeler qu’aujourd’hui, le secret de la confession, imposé aux prêtres par le droit canonique, n’est pas contraire au droit pénal français ».
Secret de la confession, assimilable au secret professionnel ?
En principe oui, le secret de la confession rentre dans le secret professionnel. C’est en tout cas ce qu’a déclaré Ludovic Danto, prêtre et doyen de la faculté de Droit canonique de l’Institut catholique de Paris, qui explique que « le droit français reconnaît que pour la bonne régulation de la vie en société, il y a des professions qui jouissent du secret professionnel. Et c’est le cas des ministres du culte ». Ainsi, pour Ludovic Danto, le droit canonique n’est pas en contradiction avec le droit français. Pour sa part, Mgr de Moulins-Beaufort évoque la circulaire de la chancellerie du 11 août 2004. Cela dit, pour les avocats pénalistes, il s’agit là ni plus ni moins d’une simple circulaire de la Direction des affaires criminelles et des grâces adressées aux parquets. Ce n’est donc ni un texte qui a force de loi, ni un arrêt de jurisprudence.
Il faut toutefois savoir que le secret de la confession est intégré au secret professionnel par des arrêts de la cour de cassation de 1810 et 1891, qui datent d’avant la séparation des Églises et de l’Etat. Ludovic Danto rappelle par ailleurs que l’arrêt le plus récent en la matière date de 2002, « lorsque la chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé l’obligation imposée aux ministres du culte de garder le secret des faits dont ils ont connaissance dans l’exercice de leur ministère ».