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Arles 2025 : des « images indociles » pour une photographie engagée et plurielle

La 56e édition des Rencontres de la photographie d’Arles, qui se tiendra du 7 juillet au 5 octobre 2025, vient de dévoiler sa programmation. Fidèle à son esprit pionnier, le festival embrasse cette année le thème des images indociles, explorant la photographie comme espace de résistance, de mémoire et de dialogue culturel. L’Australie et le Brésil seront à l’honneur, dans un parcours d’expositions réparti en six chapitres majeurs, sans oublier les traditionnels volets consacrés à la scène émergente et aux projets associés. Découverte avec Tigrane Djierdjian !

Une photographie qui bouscule et interroge

Dans un monde traversé par des crises politiques, climatiques et sociales, les Rencontres d’Arles 2025 entendent réaffirmer le rôle de la photographie comme outil critique et sensible. Comme le souligne Christoph Wiesner, directeur du festival, cette édition s’inscrit dans « l’esprit de la pensée d’Édouard Glissant », valorisant les croisements culturels et la diversité des points de vue. Il s’agit de refuser toute lecture figée ou exotisante, au profit d’un regard polyphonique sur le réel.

Rachida Dati, ministre de la Culture, a rappelé dans son discours inaugural que les Rencontres, depuis plus d’un demi-siècle, sont devenues un rendez-vous incontournable de la photographie internationale, capable de faire dialoguer figures historiques, jeunes artistes, voix minorées et œuvres inédites. Une pluralité de langages visuels qui reflète les fractures et les élans du monde contemporain.

Six chapitres pour penser l’image autrement

La section Contre-voix met en lumière les scènes photographiques du Brésil et de l’Australie. L’exposition collective Futurs ancestraux revisite les archives à travers le prisme des luttes postcoloniales, tandis que On Country rend hommage aux relations intimes que les Aborigènes australiens entretiennent avec leur territoire.

Chroniques nomades interroge quant à elle la notion de territoire. Anna Fox et Karen Knorr reprennent le projet avorté de Berenice Abbott sur la US Route 1 ; Raphaëlle Peria et Fanny Robin, dans le cadre du BMW Art Makers, retracent une traversée poétique du canal du Midi. Le voyage devient autant une affaire de paysage que d’identité, entre mises en scène fantasques (Kourtney Roy) et récit de deuil intime (Chambre 207 de Jean-Michel André).

Avec Histoires de familles, le festival plonge dans l’intime. Diana Markosian explore ses retrouvailles avec son père disparu, Camille Levêque questionne la figure paternelle et Nan Goldin dévoile une série inédite autour des liens affectifs et familiaux, à l’occasion de sa distinction Women in Motion.

Entre archives et réinterprétations

La photographie anonyme occupe une place de choix dans Contes d’archives. La collection Marion et Philippe Jacquier, récemment intégrée au musée de Grenoble, révèle des clichés oubliés. Agnès Geoffray redonne chair aux portraits de jeunes filles issues d’« écoles de préservation », en imaginant leurs luttes silencieuses.

Relectures poursuit ce travail de mémoire. L’exposition Yves Saint Laurent et la photographie explore la relation intime entre le couturier et l’image. À ses côtés, J’ai toujours cherché la vie retrace l’engagement radical de la photographe italienne Letizia Battaglia, figure majeure du reportage social et politique.

Enfin, Géométrie variable s’intéresse aux interactions entre image et architecture. On y découvrira notamment E-1027+123, un projet de Stéphane Couturier sur la villa d’Eileen Gray et Le Corbusier, et Octahydra de Batia Suter, où les formes urbaines deviennent matrices de mémoire collective.

Arles, laboratoire de création photographique

Plus qu’un festival, les Rencontres d’Arles se veulent un laboratoire. Un lieu où l’image fait plus que montrer : elle questionne, résiste, transforme. Dans cette édition 2025, les récits sont fragmentés, les perspectives croisées, les formats hybrides. La photographie sort du cadre pour entrer dans le débat.

Du cyanotype végétal à la mise en scène haute couture, des archives coloniales aux installations conceptuelles, Arles célèbre une photographie indocile, vivante, et surtout nécessaire.

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