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plaque de notaire

Sous-évaluation de biens : quid de la responsabilité du notaire ?

La responsabilité du notaire peut-elle être invoquée en cas de sous-évaluation d’un bien immobilier ? La question a le mérite d’être posée, le notaire ayant un devoir de conseil. Seulement voilà, le devoir de conseil lors de la liquidation d’une communauté ne s’étend pas à la valeur d’un bien immobilier, à de rares exceptions près. En gros, le notaire ne peut être tenu pour responsable qu’en présence d’éléments indiquant, de façon claire et limpide, qu’il y a eu sous-évaluation. Le point sur le sujet avec Frédéric Ducourau.

« Sous-évaluation manifeste »

Nous vous le disions, la responsabilité de la sous-évaluation d’un bien immobilier n’incombe au notaire que lorsque son client apporte la preuve que celui-ci avait des éléments permettant de détecter ladite sous-évaluation, de manière manifeste et claire. C’est en tout cas ce qu’a confirmé un arrêt du 6 octobre 2021 de la Cour de cassation, qui rappelle que le notaire ne peut être tenu pour responsable au cas où la sous-évaluation a seulement été « notable ».

Rappel des faits : suite à un divorce, un acte est dressé par un notaire pour partager les biens entre les deux parties, l’ex-mari recevant deux biens immobiliers. Des années passent et l’ex-mari, suite à la liquidation de la communauté de l’ancien couple, revend les deux biens immobiliers à un prix largement supérieur à l’évaluation initiale du notaire. De ce fait, l’ex-mari est condamné à payer un dédommagement du préjudice subi qui a résulté de la sous-évaluation. Raison invoquée : les biens qui lui ont été attribués après la séparation ont été vendus à un prix supérieur à celui inscrit sur l’acte notarial.

En se basant sur les indices d’évolution des prix, il a été conclu que les deux biens attribués à l’ex-mari ont été sous-évalués. Dans le détail, l’un d’entre eux a été sous-évalué de 30% et l’autre de 20% au moment du partage. De son côté, l’ex-mari blâmait le notaire, en sa qualité d’auteur de l’acte, et lui réclamait des indemnités de réparation. Selon lui, le notaire avait en sa possession suffisamment d’éléments pour suspecter une sous-évaluation.

L’arrêt du 6 octobre 2021

Que dit l’arrêt de la Cour de cassation ? L’arrêt du 6 octobre 2021 est clair à ce sujet : le notaire doit disposer d’éléments qui lui permettent de « déceler ou de suspecter une sous-évaluation manifeste » pour être tenu d’alerter ses clients. Dans l’affaire qui nous intéresse, il revient à l’ex-mari d’apporter la preuve de la négligence du notaire. Autrement dit, la simple ignorance ou désinvolture de ce dernier ne suffit pas à prouver sa responsabilité dans la sous-évaluation. Seulement voilà, les magistrats n’apportent pas de précision que les éléments supposés permettre au notaire de suspecter la sous-évaluation. Pour la Cour de cassation donc, le notaire n’est pas responsable.

Vous l’aurez compris, le notaire « a le droit » de se tromper dans l’évaluation d’un bien immobilier. Rappelons également qu’il n’est tenu d’alerter son client que lorsqu’il y a sous-évaluation manifeste.

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