Home » Business / Economie » Valoriser une entreprise avec la méthode des multiples : mode d’emploi
Valoriser une entreprise avec la méthode des multiples

Valoriser une entreprise avec la méthode des multiples : mode d’emploi

Facile à comprendre, redoutablement pragmatique… sans surprises, la méthode des multiples est l’outil favori des évaluateurs d’entreprises. Mais derrière son apparente simplicité, elle exige rigueur, finesse et bon sens. Décryptage avec Pic International !

Une règle de trois qui en dit long

Comparer une entreprise à ses semblables pour en déduire sa valeur, c’est le principe fondamental — et d’une logique implacable — de la méthode des multiples. On ne cherche pas ici à faire des projections farfelues ni à spéculer sur un avenir hypothétique. On observe, on calcule et on déduit, selon la formule suivante :

Valeur d’entreprise = Agrégat financier x Multiple de marché

L’analogie avec le marché immobilier est éclairante : la valeur d’un bien par le prix du mètre carré dans un quartier donné. En matière d’entreprise, l’unité de comparaison peut être le chiffre d’affaires, l’EBE, le REX ou encore le résultat net. Le tout est de choisir le bon levier.

Chiffre d’affaires, EBE, REX, résultat net : quel multiple pour quelle réalité ?

Le multiple de chiffre d’affaires offre une vision de la taille brute. Utile pour juger d’une activité, il reste toutefois aveugle à la rentabilité. Une entreprise peut vendre beaucoup… et perdre encore plus.

Le multiple d’EBE, lui, entre dans le vif du sujet. Il ignore la fiscalité, les amortissements et les charges d’intérêts, pour se concentrer sur la performance opérationnelle pure. C’est LE ratio roi des PME, utilisé dans l’écrasante majorité des cas, car il isole ce qui compte vraiment : la capacité de l’entreprise à produire de la valeur.

Le multiple de REX affine encore l’analyse, en intégrant l’usure des outils de production. Idéal dans l’industrie, où les investissements lourds pèsent dans la structure financière. Quant au PER (Price Earning Ratio), basé sur le résultat net, il fait entrer en jeu la dette, les impôts et la stratégie financière. Pertinent pour les sociétés cotées ou les comparaisons internationales, il reflète la vision actionnariale de la rentabilité.

Trouver le bon multiple est plus subtil qu’il n’y paraît

Derrière la froideur des chiffres se cache un vrai travail d’enquêteur, car encore faut-il trouver les bonnes transactions de référence, dans le bon secteur, avec un modèle économique semblable. Et à ce niveau, la précision est capitale. Comparer un distributeur à un fabricant ? Absurde. Une société normande à une start-up californienne ? Incohérent. L’objectif n’est pas l’exactitude mathématique, mais la cohérence économique.

Notez que la date des cessions est également un critère clé. Utiliser une transaction vieille de cinq ans dans un secteur bouleversé par la technologie, c’est aussi hors de propos qu’évaluer un cabriolet en plein hiver.

Cas pratique

Prenons la société ALPHA, au profil typique d’une PME, avec un EBE d’un million d’euros. Dans son secteur, le multiple médian est de 6. Résultat : une valorisation brute de 6 millions d’euros. En ajustant avec sa trésorerie (+1,5 M€) et sa dette financière (-2 M€), la valeur des titres s’établit à 5,5 millions d’euros.

Face à elle, la société DELTA affiche un EBE de 840 000 euros. Appliqué au multiple de 3,6 (issu d’un cas comparable, la société BETA), sa valorisation atteint 3,024 millions d’euros.

Derrière la méthode, une mécanique de précision

Ce que la méthode des multiples exige, ce n’est pas tant une expertise technique que du bon sens économique et une grande honnêteté intellectuelle. La donnée brute ne suffit pas. Il faut la confronter, la filtrer et, enfin, l’interpréter.

À ce niveau, le choix du multiple est stratégique. Trop bas, il sous-évalue l’entreprise. Trop élevé, il risque de la rendre invendable. Tout repose sur la justesse de la comparaison, la pertinence des données, et la compréhension du contexte.

Laisser un commentaire