Les pays nordiques sont reconnus pour combiner une croissance économique saine avec des politiques sociales et environnementales fortes. Quel est leur secret pour une reprise verte ? La réponse avec Jean Marc Borello, président du groupe SOS, fortement impliqué dans les questions de développement durable à l’international.
Durabilité : quel est le secret des pays scandinaves ?
Depuis l’an 2000, les économies nordiques ont connu une croissance de 28 %, tandis que les émissions de dioxyde de carbone ont diminué de 18 %. Ceci est la preuve que ces pays sont passés maîtres dans l’art de combiner croissance économique et développement durable. Le Danemark, la Finlande, la Norvège et la Suède visent à être neutres en carbone d’ici 2050, grâce à des investissements dans les énergies renouvelables, la bioénergie et les compensations carbone. Quel est leur secret ?
L’une des clés du succès de ces pays a été leur utilisation pionnière de la taxation de l’énergie au début des années 1990, face à une récession provoquée par une crise bancaire majeure résultant d’une déréglementation financière excessive, exacerbée par la faiblesse des prix du pétrole à la fin des années 1980 (pour la Norvège) et l’effondrement de l’Union soviétique (pour la Finlande).
Transformer la crise en une opportunité de réforme
Dans le sillage d’une crise économique, les gouvernements ont désespérément besoin de liquidités. L’expérience nordique montre que la taxation des combustibles fossiles est un moyen efficace d’augmenter les recettes et de réduire les déficits budgétaires.
La Finlande a été le premier pays au monde à introduire une tarification du carbone en 1990, suivie du Danemark. La Suède a introduit une série de nouvelles taxes sur l’énergie, notamment sur les émissions de carbone et de soufre en 1991, accompagnées d’une réduction des impôts sur le revenu. La Norvège a mis en place une taxe sur le carbone la même année et a appliqué le taux le plus élevé au secteur de la production de pétrole et de gaz, au-delà de ce qui a été réalisé par de nombreux pays.
Contrairement aux arguments contre la taxation de l’énergie, ces mesures n’ont pas provoqué de marasme économique. Les pays scandinaves ont en effet prospéré. En Suède, l’activité économique a augmenté de 58 %, tandis que les émissions de CO2 ont diminué de 16 % entre 1990 et 2011. Au Danemark, la production industrielle a augmenté de 27 %, tandis que les émissions industrielles ont diminué de 7 % entre 1991 et 1999. Au cours des 30 dernières années, l’économie danoise a connu une croissance de 78 %, tandis que la consommation d’énergie est restée pratiquement inchangée.
Autre exemple : le PIB de la Norvège a augmenté de 73 % entre 1990 et 2012. La croissance a été en partie tirée par l’extraction du pétrole et du gaz, avec une augmentation des émissions globales qui en a résulté. Toutefois, les réformes norvégiennes ont tout de même permis de réduire considérablement les émissions par unité de PIB grâce à la réduction de l’intensité énergétique, aux changements dans le bouquet énergétique et à la réduction des émissions liées aux processus.